Le vaginisme : Un enjeu de la sexualité féminine

Publié le 25 août 2023 et mis à jour le 1 septembre 2025 par Louise Paitel
Le vaginisme : Un enjeu de la sexualité féminine

Le vaginisme est un trouble sexuel féminin rendant toute pénétration vaginale douloureuse, voire impossible (Pacik, 2014 ; Lamont, 1978). Bien que sa prévalence exacte reste difficile à établir, il représenterait entre 1 % et 5 % des femmes en âge de procréer (Lamont, 1978 ; Pacik, 2014). Mais cette prévalence semble sous-estimée, car c’est un motif de consultation fréquent dans les consultations de sexologie (Urgogyn, 2025).

En effet, le vaginisme reste entouré de croyances erronées et de honte, ce qui retarde la prise en charge et aggrave la détresse psychologique des femmes concernées (Pacik & Geletta, 2017 ; Melnik et al., 2022). De plus, ces dernières consultent moins en santé sexuelle en raison d’expériences négatives lors d’examens gynécologiques antérieurs (Chalmers, 2024).

Qu’est-ce que le vaginisme ?

Le vaginisme se définit comme une contraction réflexe et persistante des muscles entourant l’entrée du vagin (muscles pubo-coccygiens). Elle survient lors de toute tentative de pénétration, qu’il s’agisse d’un rapport sexuel, de l’insertion d’un tampon ou d’un spéculum lors d’un examen gynécologique (Pacik, 2014 ; Lamont, 1978). Cette contraction, involontaire et non consciente dans un premier temps, peut être primaire (présente dès les premiers rapports) ou secondaire (apparaissant après une période de sexualité sans difficulté) (MedG, 2019). Pour être diagnostiqué, le vaginisme doit être présent depuis six mois et entraîner un retentissement sur la qualité de vie de la patiente.

Schéma issu du site Urgogyn, 2025

Récemment, l’appellation « vaginisme » a été modifiée pour devenir le « trouble de douleur génito-pelvienne / trouble de la pénétration » (DSM-5-TR, APA, 2022). Il comprend la peur de la pénétration, la douleur à la pénétration et la dysfonction du plancher pelvien (Lahaie et al., 2015). Toutefois, dans la pratique, le terme « vaginisme » reste d’usage courant et utile pour nommer l’expérience vécue par les patientes (Chalmers, 2024).

Les symptômes principaux du vaginisme sont :

  • Une impossibilité de pénétration, malgré le désir sexuel et le souhait exprimé d’une pénétration (Basson et al., 2004).
  • Une douleur intense (appelée dyspareunie) à l’entrée du vagin, souvent décrite comme une sensation de brûlure, de blocage ou de déchirure.
  • Une anxiété anticipatoire (la peur d’avoir mal), qui provoque l’évitement des situations de pénétration, souvent associée à une détresse psychologique (Pacik & Geletta, 2017 ; Melnik et al., 2022).

À noter que le vaginisme doit être différencié de la dyspareunie (douleur pendant les rapports sexuels, sans contraction musculaire) et de la vulvodynie (douleur persistante au niveau de la vulve), bien que ces trois troubles puissent apparaître en même temps.

Les causes du vaginisme

Elles sont multifactorielles, combinant souvent des dimensions psychologiques, physiologiques et contextuelles.

Facteurs psychologiques et émotionnels

  • Éducation et croyances : Une éducation sexuelle restrictive, des interdits religieux ou culturels et une méconnaissance de l’anatomie féminine peuvent favoriser l’apparition du trouble (MedG, 2019).
  • Traumatismes : Des antécédents d’abus sexuels, d’examens gynécologiques douloureux ou d’accouchements traumatiques peuvent participer au vaginisme (Pacik & Geletta, 2017).
  • Peur et anxiété : La peur de la douleur, de la fécondation, de la grossesse ou une perception erronée de la taille du vagin entretiennent le vaginisme.
  • Conflits relationnels : Des difficultés dans le couple, une insistance ou une incompréhension de la part du.de la partenaire, un manque de communication peuvent provoquer ou aggraver le vaginisme (MedG, 2019).

Facteurs physiologiques

  • L’hypertonie du plancher pelvien : Une tension musculaire chronique, souvent liée au stress ou à des habitudes posturales, participe au vaginisme (Melnik et al., 2022). Par exemple, on peut retrouver chez les patientes souffrant de vaginisme des cavalières ou des danseuses, pratiquant le sport intensif depuis l’enfance.
  • Les infections ou inflammations : Des vaginites à répétition, une endométriose ou des séquelles de chirurgie pelvienne peuvent provoquer une douleur chronique (Vidal, 2025), qui amène les muscles du vagin à se contracter.
  • La sécheresse vaginale, due à la ménopause, l’allaitement, le manque d’excitation… favorise également la douleur associée au vaginisme (Pacik, 2014).

Facteurs contextuels

  • Le manque d’information : La sexualité restant un sujet délicat pour la plupart des personnes, beaucoup de femmes n’ont pas appris que le vagin est un organe auto-lubrifiant et extensible. Elles imaginent qu’il peut se déchirer facilement et que son entrée et son intérieur sont trop petits pour accueillir un doigt, un pénis, un sextoy, un tampon…
  • La pression sociale autour de la sexualité : Les injonctions à la performance sexuelle, à la pénétration et au plaisir sont nombreuses. Chez les femmes souffrant de vaginisme, elles entretiennent malheureusement une culpabilité liée à l’incapacité, à la différence et au manque de plaisir (MedG, 2019).

Le diagnostic

Il repose sur un entretien clinique afin d’évaluer les symptômes, les antécédents médicaux et psychosexuels et l’impact sur la qualité de vie (Melnik et al., 2022). Un examen gynécologique est nécessaire, mais seulement si la femme est d’accord et peut le tolérer, car aucun examen gynécologique ne peut et ne doit être imposé ! La patiente pourra par exemple choisir le moment, écouter les explications des gestes pratiqués pas-à-pas et demander l’arrêt de l’examen en cas de douleur. Aussi, l’examen pourra être pratiqué dans une position alternative (sur le côté), avec un spéculum de petite taille lubrifié, pour limiter la contraction des muscles fessiers et pelviens (Chalmers, 2024).

Pratiqué avec douceur, l’examen clinique permettra d’évaluer le tonus musculaire et d’écarter d’autres causes possibles (inflammations, cicatrices, dermatoses…) (Pacik, 2014). Éventuellement, des questionnaires validés, comme l’Index de la Fonction Sexuelle Féminine (Trudel et al., 2012) ou l’échelle de Lamont (Lamont, 1978) peuvent confirmer la présence et la sévérité du vaginisme.

La prise en charge

La prise en charge du vaginisme repose sur une combinaison de thérapies adaptées à chaque patiente. Les approches les plus efficaces sont détaillées ci-dessous (Melnik et al., 2022), sachant qu’il est également tout à fait possible et agréable, pour certaines patientes et leurs partenaires, de pratiquer tout simplement une sexualité non-pénétrative.

Les thérapies cognitivo-comportementales (TCC)

Elles visent à désensibiliser la patiente à la peur de la pénétration, via une exposition (mise en situation) d’abord en imagination, puis dans la réalité. Cette confrontation progressive est définie avec la patiente, pour que les exercices soient doux et possibles. Ils seront toujours adaptés à son parcours, ses difficultés et ses capacités. En parallèle, la patiente va remettre en question et modifier ses croyances erronées sur la sexualité et l’anatomie (par exemple : « Mon vagin est trop petit », « La pénétration va déchirer la peau du vagin, qui est comme du papier fin »).

Enfin, l’apprentissage de techniques de relaxation (respiration, pleine conscience, body scan…) est nécessaire pour réduire l’anxiété et favoriser le relâchement musculaire. Le but est de réduire le cercle vicieux « douleur – peur – tension musculaire » qui entretient le vaginisme (Vlaeyen & Linton, 2000 ; McEvoy et al., 2021). En effet, une expérience douloureuse à la pénétration nourrit des cognitions anxieuses (« Je vais avoir trop mal », « Je ne peux pas »), qui induisent l’hypervigilance et hypertonie du plancher pelvien. Et l’évitement du rapport sexuel à court terme réduit l’anxiété, mais entretient la peur et la dysfonction sur le long terme (Vlaeyen & Linton, 2000).

Selon Pacik (2014), les TCC permettent une amélioration significative dans 70 à 80 % des cas, amélioration confirmée par d’autres études (Ter Kuile, 2013 ; Maseroli et al., 2018).

La sexothérapie

Elle débute par l’éducation sexuelle, pour transmettre à la patiente des informations sur l’anatomie, la lubrification et la réponse sexuelle féminine. Des exercices de couple peuvent être proposés comme la communication des sensations agréables, le toucher non génital et l’exploration progressive de la pénétration, d’abord avec un doigt. Le Sensate Focus est ici tout à fait adapté pour permettre aux partenaires de reprendre une sexualité agréable, sensuelle et sans enjeu de pénétration.

Ensuite, et seulement si cette pratique est désirée par les deux partenaires, le corps se réhabitue à la pénétration et à ses sensations, sans douleur, grâce à l’utilisation de dilatateurs vaginaux de tailles croissantes (Pacik, 2014). Cette étape peut être accompagnée par un.e kiné spécialisé.e, un.e gynécologue ou un.e sage-femme. En parallèle, la rééducation périnéale permettra à la femme d’identifier et de relâcher les muscles du plancher pelvien.

La thérapie de couple

Le vaginisme a un impact majeur sur la dynamique sexuelle, émotionnelle et relationnelle. Une prise en charge conjugale est souvent nécessaire pour améliorer la communication, le soutien perçu et réduire la pression liée à la pénétration. Aussi, expliquer les mécanismes du vaginisme au.à la partenaire est utile pour l’aider à comprendre les causes involontaires du trouble et éviter les attitudes culpabilisantes ou de rejet. Il.elle peut également participer aux exercices de désensibilisation en proposant avec douceur l’introduction d’un doigt ou des dilatateurs.

Enfin, la sophrologie et l’hypnose peuvent être proposées en complément pour travailler sur la détente corporelle et la représentation mentale du vagin.

Traitements et interventions complémentaires

Les traitements locaux comme les lubrifiants et les anesthésiants peuvent d’emblée réduire la douleur lors des rapports sexuels. Mais en cas d’infection sous-jacente, des antifongiques ou antibiotiques sont nécessaires (Vidal, 2025). De même, l’hormonothérapie peut être prescrite pour les vaginites atrophiques dues à la ménopause (Pacik, 2014). Si vous avez un doute, n’hésitez pas à consulter un.e urologue, un.e gynécologue, une.e sage-femme ou un.e médecin sexologue.

En cas de vaginisme sévère résistant, des interventions complémentaires peuvent être envisagées avec l’avis d’un.e médecin, comme des injections de Botox dans les muscles hypertoniques (Pacik, 2014), mais leur efficacité reste controversée.

"Le vaginisme reste un trouble méconnu et tabou. Pourtant, il n’est pas volontaire et se soigne très bien en santé sexuelle. Il est primordial de ne pas rester dans le silence, l’incompréhension et la douleur. Si vous en souffrez, n’hésitez pas à consulter un.e sexologue ou un.e professionnel.le spécialisé.e pour vous faire accompagner." - Louise PAITEL, Psychologue clinicienne et sexologue diplômée, chercheuse à l’Université Côte d’Azur de Nice. -

Pronostic

Avec une prise en charge globale et adaptée, une grande majorité des femmes parviennent à retrouver une sexualité épanouie (Ter Kuile, 2013 ; Pacik, 2014 ; Maseroli et al., 2018). L’amélioration s’évalue également à l’absence de contraction réflexe et de douleur lors des activités sexuelles. La durée du traitement varie de quelques mois à plusieurs années, selon la sévérité et l’ancienneté du trouble.

Conclusion

Les femmes souffrant de vaginisme ne sont pas seules, des solutions existent et une sexualité sans douleur est possible ! Ce trouble est certes complexe, mais il peut se soigner grâce à une approche pluridisciplinaire combinant psychothérapie, rééducation périnéale et si besoin, accompagnement du couple. La clé de l’amélioration réside dans la communication, l’éducation sexuelle et une prise en charge sur mesure, adaptée aux causes et au vécu de chaque patiente. Pour finir, deux ingrédients sont essentiels : la patience et la bienveillance, envers soi-même pour les patientes et envers la personne en souffrance pour le.la partenaire. Malgré l’ancienneté du trouble et l’envie d’une amélioration rapide, il convient d’accepter que les progrès soient progressifs.

Si vous avez besoin de soutien sur ce trouble, n’hésitez pas à contacter l’association « Les Clés de Vénus ».

Ce contenu a été écrit par Louise PAITEL , Psychologue clinicienne et sexologue diplômée, chercheuse à l’Université Côte d’Azur de Nice. Elle accompagne LOVE AND VIBES en apportant une approche scientifique et bienveillante de la sexualité.

Références

  • American Psychiatric Association. (2022). Diagnostic and statistical manual of mental disorders (5e éd., texte révisé [DSM-5-TR]). American Psychiatric Publishing.
  • Basson, R., Leiblum, S., Brotto, L., Derogatis, L., Fourcroy, J., Fugl-Meyer, K., Graziottin, A., Heiman, J., Laan, E., Meston, C., Schover, L., van Lankveld, J., & Schultz, W. W. (2004). Revised definitions of women’s sexual dysfunction. The Journal of Sexual Medicine, 1(1), 40–48.
  • Chalmers, K. J. (2024). Clinical assessment and management of vaginismus. Australian Journal of General Practice, 53(1–2), 32–39.
  • Urgogyn (2025). Le vaginisme : définition, causes et solutions.
  • Lahaie, M.-A., Amsel, R., Khalifé, S., Boyer, S., Faaborg-Andersen, M., & Binik, Y. M. (2015). Can fear, pain, and muscle tension discriminate vaginismus from dyspareunia/provoked vestibulodynia? Implications for the new DSM-5 diagnosis of genito-pelvic pain/penetration disorder. Archives of Sexual Behavior, 44(6), 1537–1550.
  • Lamont, J. A. (1978). Vaginismus. American Journal of Obstetrics and Gynecology, 131(6), 633–636.
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