Avoir une vie sexuelle active et se masturber : est-ce vraiment compatible ?

Publié le 20 novembre 2025 et mis à jour le 21 novembre 2025 par Claire
Avoir une vie sexuelle active et se masturber : est-ce vraiment compatible ?

Peut-on avoir une vie sexuelle très active et continuer à se masturber sans que cela pose problème ? Beaucoup de personnes se demandent s’il est “normal” de se caresser en solo quand on a déjà des rapports réguliers. D’autres culpabilisent par peur de blesser leur partenaire ou de donner l’impression que la relation ne suffit pas.

Pourtant, la masturbation fait partie de la sexualité, point. Elle ne s’éteint pas comme par magie dès qu’on est en couple ou qu’on a une vie intime bien remplie. Elle peut au contraire coexister avec les rapports à deux, et même les enrichir.

Dans cet article, nous vous proposons de déconstruire quelques idées tenaces et de voir comment sexualité partagée et sexualité en solo peuvent très bien fonctionner ensemble, sans jalousie, sans honte et sans prise de tête.

Pourquoi oppose-t-on souvent masturbation et vie sexuelle active ?

On a longtemps entendu qu’il fallait choisir : soit on a une “vraie” sexualité à deux, soit on se masturbe… en attendant mieux. Résultat : dès que la masturbation est présente dans un couple, beaucoup y voient un problème caché.

On retrouve encore des idées comme :

  • “S’il/elle se masturbe, c’est qu’il/elle n’est pas satisfait·e.”
  • “La masturbation, c’est pour les ados ou les célibataires.”
  • “Quand on est en couple, ça ne se fait plus.”

Ces croyances se basent sur une vision très réduite de la sexualité, comme si tout se résumait à la pénétration en couple. La masturbation est alors perçue comme un plan B, alors qu’il s’agit d’une forme de sexualité à part entière, avec ses propres bénéfices, ses propres plaisirs.

L’éducation et la culture n’aident pas toujours. Beaucoup de personnes ont grandi avec un discours culpabilisant : “c’est sale”, “c’est honteux”, “ça abîme la santé”, ou encore “tu verras, plus tard, tu n’en auras plus besoin”. Autant de messages qui peuvent rester en toile de fond, même à l’âge adulte.

La pornographie joue parfois aussi un rôle : elle insiste surtout sur la performance, la pénétration, des scénarios très codifiés… et laisse peu de place à l’idée qu’on puisse aussi avoir une vie intime riche en solo, même en étant bien dans son couple.

Ce que la masturbation apporte, même avec une vie sexuelle épanouie

Se masturber alors qu’on a déjà des rapports fréquents, ce n’est pas “trop”, ni “en trop”. C’est juste une autre façon d’explorer son plaisir.

Mieux connaître son corps et ses réactions

Quand vous vous masturbez, vous êtes à l’écoute de vos sensations : quel geste vous plaît, quel rythme vous excite, où poser la main, quand ralentir, quand accélérer. C’est un terrain d’exploration très concret.

À force, vous savez mieux ce dont vous avez besoin pour vous exciter, vous détendre, atteindre ou non l’orgasme. Cette connaissance est précieuse en couple : elle vous aide à expliquer ce que vous aimez, à guider votre partenaire, à sortir du fameux “devine ce que je veux” qui frustre tout le monde.

Un moyen simple de gérer désir et frustration

Dans la vraie vie, les deux partenaires n’ont presque jamais la même envie au même moment, avec la même intensité. Il y a la fatigue, le stress, les enfants, les horaires, les soucis… bref, la vie.

La masturbation permet de “gérer” certaines envies sans transformer chaque différence de désir en drame. Elle évite de faire peser sur l’autre l’obligation de dire oui à chaque fois. Elle peut aussi être un soutien dans les périodes où les rapports sont plus rares : maladie, déplacement, postpartum, charge mentale à bloc…

Dans ce cadre, la masturbation n’est pas un signal d’alerte, mais une façon saine de prendre soin de son propre désir.

Un espace intime rien qu’à soi

Même dans un couple très complice, tout n’a pas besoin d’être partagé. Avoir un jardin secret ne signifie pas aimer l’autre moins, c’est juste préserver un espace personnel.

La masturbation fait partie de ces moments à soi. Vous n’avez pas besoin de parler, de performer, de vous adapter. C’est votre parenthèse, votre rythme, vos fantasmes. Cet espace personnel ne retire rien au couple ; il peut même vous aider à revenir vers l’autre plus détendu·e et plus disponible.

La masturbation peut-elle nuire à la vie sexuelle à deux ?

Dire que masturbation et vie sexuelle active sont compatibles ne veut pas dire qu’il n’y a jamais de tensions. Comme pour tout, des déséquilibres peuvent apparaître.

Quand la masturbation devient un refuge pour éviter l’autre

Il arrive que la masturbation soit utilisée comme refuge, pour éviter les rapports quand la relation traverse une zone compliquée : conflits, blessures non digérées, perte de confiance en soi, peur d’être jugé·e…

Dans ce cas, le souci n’est pas la masturbation, mais ce qu’elle vient camoufler. Si vous préférez systématiquement vous masturber plutôt que de partager un moment intime, si vous fuyez les rapprochements, il peut être utile de vous demander ce qui se joue : fatigue, peur, colère, baisse de désir, rancœur non dite…

Quand les écrans prennent toute la place

La masturbation en elle-même est neutre. Ce qui peut poser problème, c’est parfois l’usage intensif de certains supports, notamment le porno.

Si vous sentez que vous avez du mal à vous exciter sans vidéo, vous avez besoin de contenus toujours plus extrêmes, vous comparez votre partenaire aux images vues, ou que votre partenaire se sent dévalorisé·e face à ces contenus, alors c’est l’organisation globale de votre sexualité qui mérite d’être revisitée. Là encore, ce n’est pas “masturbation vs couple”, mais “comment intégrer ces supports sans qu’ils déséquilibrent tout”.

Des signaux à écouter

Quelques indicateurs peuvent alerter :

  • baisse durable de votre désir pour votre partenaire ;
  • impression de préférer systématiquement le solo ;
  • culpabilité forte, impression de ne plus maîtriser la fréquence ;
  • disputes répétées dans le couple autour de ce sujet.

Ce ne sont pas des preuves qu’il faut tout arrêter, mais des signaux qu’il est temps de parler, voire de se faire accompagner (sexologue, thérapeute) pour apaiser les tensions.

Comment parler de masturbation dans le couple sans gêne ni jugement ?

La question n’est pas seulement “vous masturbez-vous ?”, mais surtout : “pouvez-vous en parler ensemble sans vous juger ?”. C’est là que tout se joue.

Communiquer

Choisir un moment calme

Éviter le débat lancé à chaud après avoir surpris une vidéo ou un sextoy sur la table de nuit. Préférez un moment où vous êtes disponibles et détendus, sans pression.

Vous pouvez par exemple dire :

  • Je me pose des questions sur la masturbation quand on est en couple, j’aimerais avoir ton avis.
  • Je me demande comment tu vis le fait que je me masturbe parfois, ça te va si on en parle ?

L’idée est de partager vos ressentis, pas de coincer l’autre dans un interrogatoire.

Parler de ses besoins et de ses limites

Chacun a sa façon de vivre la masturbation. Pour certain·e·s, c’est très privé. Pour d’autres, c’est quelque chose qu’ils aimeraient parfois inviter dans la sexualité à deux.

Vous pouvez dire, par exemple :

  • que savoir que votre partenaire se masturbe ne vous pose aucun problème, mais que ça vous blesse si vous avez l’impression qu’il/elle vous évite ;
  • ou au contraire que vous avez besoin que ce soit un espace très personnel, sans que l’autre s’y sente exclu.

Il n’y a pas de “bonne” manière de faire, seulement celle qui convient à votre couple.

Rassurer sur la place de chacun

Beaucoup de craintes tournent autour de cette idée : “Et si je ne lui suffisais plus ?”. D’où l’importance de rappeler clairement que la masturbation ne remplace pas le/la partenaire.

Les sensations en solo et les sensations à deux ne jouent pas dans la même catégorie : la présence de l’autre, les caresses, la chaleur du corps, les regards, les paroles murmurées… tout cela ne peut pas être reproduit seul·e. Ce sont deux registres différents, pas un classement avec un “meilleur” et un “pire”.

La vraie question n’est donc pas “est-ce compatible ?”, mais : “Comment organiser notre sexualité pour que ces deux dimensions se complètent, plutôt que de se faire concurrence ?”

La réponse tient en quelques piliers : se connaître, se respecter, oser parler, ajuster au fil du temps. Avec ça, il devient tout à fait possible d’avoir une vie sexuelle active, de continuer à se masturber… et d’en faire deux belles sources de plaisir au lieu d’un sujet de conflit.